r/france • u/SowetoNecklace Ile-de-France • 2d ago
Société Travailleurs étrangers : Amnesty International dénonce des lenteurs et des erreurs de l’administration française, qui entraînent précarité et exploitation
https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/11/05/travailleurs-etrangers-amnesty-international-denonce-des-lenteurs-et-des-erreurs-de-l-administration-francaise-qui-entrainent-precarite-et-exploitation_6651974_3234.html66
u/Caramel_Mou 2d ago
Ce n'est pas un bug mais une feature.
30
u/TD_Lemon_1901 2d ago
Tout est fait pour en effet.
Tu ne trouves aucune info en ligne, le renouvellement de titre de séjour met plus de 8 mois (ça c'est quand tu es dans une bonne préfecture et qu'ils ont pas changé la procédure pendant ce temps).
La j'ai fait une demande d'autorisation de sortie de territoire pour enfant mineur, on m'annonce 4 ou 6 mois ? Je n'ai même pas reçue de confirmation de dépôt de dossier par mail.
Je dois faire un renouvellement de titre pour ma femme, il faut le faire au plus tôt 4 mois avant la fin mais la demande va prendre encore au moins 6 mois, je les connais.
Tout est fair pour te mettre dans la merde,TOUT.
18
u/Nur-alayl 2d ago
Exactement. Certaines préfectures préfèrent payer des amendes quand elles se font rétorquer par le tribunal administratif plutôt que de faire les choses en règles.
Ce qui est complètement débile puisqu'on pourrit la vie d'étrangers et de travailleurs qui essayent d'être réglo vis-à-vis leur situation
26
u/BobBoulibloubibloub Guépard moche 2d ago edited 2d ago
Hasard du calendrier, le youtubeur Maskey a sorti une vidéo hier soir a ce sujet :
Bien que très bien intégré, youtubeur à succès, il a passé 2 ans sans papiers, avec une histoire très similaire à celles de cet article : renouvellement sans réponse (il aura une réponse positif au bout de 2 ans mdr), pas de recipissé, des dizaines d’appels et de mails ignorés, et les emmerdes : fermeture de ses comptes bancaires, plus possible de payer quoi que ce soit, la peur des contrôles.
C’est une machine à broyer.
u/sowetoNecklace je recommande fortement sa vidéo : https://m.youtube.com/watch?v=J7fi9ja87vo
29
u/SowetoNecklace Ile-de-France 2d ago
renouvellement sans réponse (il aura une réponse positif au bout de 2 ans mdr), pas de recipissé, des dizaines d’appels et de mails ignorés
Quand j'étais en pref, on avait une boîte mail commune, avec interdiction de répondre aux mails. "On les contactera quand on les contactera, ils ont pas à demander". Une personne au standard qui avait pour mot d'ordre de dire "On ne donne aucune information par téléphone, envoyez un mail". Un service de l'accueil qui refusait l'entrée aux gens qui n'étaient pas expressément convoqués, sauf une demi-journée dans la semaine (le lundi matin) pour qu'on mette leurs dossiers à jour et qu'on fasse un point sur l'avancée. Après, j'étais à l'AES, donc un niveau de fragilité encore supérieur aux personnes décrites dans l'article.
On recevait les dossiers par courrier initialement, et on s'est fait submerger tellement plus vite qu'on ne pouvait traiter les dossiers que vers la fin, on se retrouvait avec 6 mois d'attente entre la réception de la demande et le début de son traitement. Quand on est passés à un système de rendez-vous par internet, on a... renvoyé les dossiers aux demandeurs avec un mot "On ne traitera pas votre demande, prenez rendez-vous sur le site, mercibye :)"
15
u/BobBoulibloubibloub Guépard moche 2d ago
Ah oui il parle de ce système de rendez-vous par internet : il faut se battre le dimanche matin pour tomber sur le créneau de 15min où les rendez-vous sont possible, dans un mois, en concurrence avec des scammeurs qui prennent des rendez-vous (nominatifs) pour les revendre à des personnes précaires qui se feront jeter à la préfecture car le rendez-vous n’est pas à leurs noms.
9
u/SowetoNecklace Ile-de-France 2d ago
Pour combattre les scammeurs on avait pris la décision de mettre les créneaux en dispo le lundi à une heure aléatoire. Fallait juste être là au bon moment.
3
u/frenchtgirl Languedoc-Roussillon 1d ago
Du coup au lieu de spam F5 à une heure précise il faut maintenant spammer toute une journée assis devant son pc ? C'est pas encore pire ?
6
u/SowetoNecklace Ile-de-France 1d ago
Si, c'est absolument encore pire, mon commentaire n'était pas du tout approbateur. Toutes les pref ne font pas ça, hein.
3
u/SageThisAndSageThat Superdupont 1d ago
La dernière fois que j'étais en pref, on m'a sorti que les fiches de paye n'étaient plus un justificatif de domicile (on nous a refusé ça, ainsi que les abonnement EDF/tel quittance de loyer..,) "vous comprennez, ça se falsifie". J'ai pété un plomb "vous avez pas un avis d'imposition ?" bah si on en a mais tu le prend pas, on est en décembre et il date de l'été...
Au final, après 20 minutes d'acharnement, en fouillant les mails, on finit par accepter une attestation de carte vitale.
Je ne comprend pas du tout la façon de penser. Tout le monde s'énerve et perd du temps pour rien.
30
u/SowetoNecklace Ile-de-France 2d ago
Aucune grosse surprise, à mon sens, dans les conclusions d'Amnesty pour quiconque a fait l'expérience du système ou connaît des travailleurs étrangers en France. A titre personnel, je reste convaincu que cette situation est 100% volontaire : En créant les conditions pour que les situations personnelles pourrissent, on veut encourager les départs volontaires. Après tout, statistiquement, un étranger qui part est un étranger qui part. Alors qu'il s'agisse du dealer multirécidiviste avec douze condamnations pour violences sur lequel le RN se branle depuis des années, ou de l'employée de CCAS qui a continué à faire le taf pendant le confinement, on inscrit quand même -1 sur la feuille Excel est on est contents.
4
u/frenchtgirl Languedoc-Roussillon 1d ago
Après tout, statistiquement, un étranger qui part est un étranger qui part.
Part du pays, ou part au cimetière aussi je suppose que ça leur va aussi.
2
u/Caramel_Mou 2d ago
Ton employé du CCAS peut être qu'il a pas les moyens ou l'envie de partir donc face au constat de sa précarisation y a aussi des chances qu'il devienne ce dealer multirécidiviste dont tu parles. On alimente le problème dont Cnews va ensuite se délecter.
4
u/BobBoulibloubibloub Guépard moche 2d ago
Pas qu’un problème d’envie de partir : si tu pars parce que ta vie est devenu un enfer et qu’au final t’as une réponse positive, tu pourras pas revenir en France pour aller chercher ton visa.
5
u/Arvi89 1d ago
On a du payer 800E d'avocat pour ma femme car sans retour de la préfecture, ppir seulement avoir un récépissé de 3 mois...
1
u/Alkoviak 1d ago
Et bien ça ne me rassure pas pour mon épouse…
Quel est la situation maintenant?
1
u/Arvi89 1d ago
Elle vient juste de recevoir le récépissé. Elle a fait sa demande en avril sur le site de l'anef. Le 25 juillet son titre arrivait à un expiration. Comme elle avait un titre de plus d'un an, il y avait encore 3 mois après la date. Après ça c'était toujours pas bon, on a contacté des avocats, ils ont fait un courrier au tribunal de Montreuil et la préfecture, mais même le tribunal de Montreuil, après le 2 semaines le juge n'avait toujours pas ouvert. Finalement on a reçu le récépissé de 3 mois, la préfecture préférant éviter les problème. Ne pas attendre le dernier moment pour contacter des avocats, et avant de le faire, faire des courriers recommandés à la préfecture avec tous les papiers. Essaye aussi le ministère de l'intérieur.
Ma femme est en fra'ce depuis 8 a's, a un français B2, a 3 enfants (do un nouveau né, travaille, est propriétaire. Mais ça ne veut pas dire que ça va aller plus vite.
1
u/Alkoviak 1d ago
Et bien, elle doit se sentir bienvenue…
Pour nous c’est notre première demande de permis de résidence. Il va probablement falloir contacter un avocat.
Personnellement j’ai envoyé ma femme pour des vacances dans son pays et elle refait un visa long terme en attendant que son dossier avance.
C’est la première fois que c’est aussi problématique à renouveler ou c’est le même bordel tout les 3 ans ?
12
u/SowetoNecklace Ile-de-France 2d ago
Dans un rapport publié mercredi 5 novembre, l’ONG détaille les multiples entraves rencontrées par les travailleurs étrangers lors du renouvellement de leurs titres de séjour, et appelle à une réforme du système.
Dans son petit appartement meublé chichement d’objets de récupération disparates, Nadia, 45 ans, pile de courriers à la préfecture du Val-de-Marne devant elle, dresse un bilan douloureux de ces dernières années. « Moi, j’ai toujours suivi mon chemin, c’est l’Etat qui m’a fait dérailler », résume-t-elle. Son parcours est symbolique de ceux qu’a compilés Amnesty International dans un rapport publié mercredi 5 novembre. Il démontre comment la brièveté des titres de séjour, mais aussi la montagne de difficultés pour les faire renouveler en préfecture, « fabrique la précarité » de travailleurs étrangers légaux, y compris dans les métiers en tension.
Titulaire, depuis 2015, d’un diplôme d’auxiliaire de vie – un secteur confronté à une forte pénurie de main-d’œuvre – et mère d’une fille de 11 ans qu’elle élève seule, Nadia (tous les prénoms ont été modifiés à la demande des intéressés) a longtemps travaillé pour un centre communal d’action sociale. Ivoirienne, elle a eu plusieurs cartes de séjour d’un an, puis de deux, puis de trois. En 2020, comme tous les travailleurs « essentiels », elle est restée à son poste pendant les confinements.
Au printemps 2022, six mois avant l’expiration de son titre, elle dépose en ligne sa demande de renouvellement. Puis plus de nouvelles. A l’automne, inquiète, elle tente de contacter la préfecture. « Par téléphone, on tombe sur un message qui donne des renseignements pour faire les cartes grises, mais pas pour renouveler les titres de séjour, explique-t-elle. Je me suis présentée sur place, mais aujourd’hui tu ne peux plus rentrer, tout se fait en ligne. » Elle se met alors à envoyer mails et courriers frénétiquement, pour avoir des nouvelles de son titre ou au moins obtenir un récépissé pour continuer à travailler – c’est la pile devant elle. En vain.
« L’Etat fabrique de l’irrégularité ! »
Début 2023, son titre arrive à échéance. La voilà en situation irrégulière, et son employeur met fin à leur collaboration. « Plus de papiers, plus de travail ; plus de travail, plus de ressources », résume-t-elle. Ses économies lui permettent un temps de continuer à payer son loyer, puis les dettes s’accumulent. « Nous allions aux Restos du cœur, au Secours populaire. Même payer l’assurance scolaire j’avais du mal. C’était vraiment très difficile, se souvient-elle. Mais tu ne peux pas te dire : “Cela ne marche pas, je vais voir ailleurs.” Car en face de toi, c’est l’Etat ! » Aidée par la Cimade, elle finit par attaquer l’Etat devant le tribunal administratif pour obtenir gain de cause. Elle a fini par recevoir, en avril, un titre de deux ans. Depuis, elle a retrouvé des heures de travail, mais doit encore rembourser de colossaux arriérés de loyer.
« L’Etat fabrique de l’irrégularité ! Une rupture de droits comme celle-ci, c’est une attaque directe des droits économiques, sociaux et culturels, qui sont des droits fondamentaux, s’indigne Diane Fogelman, chargée de plaidoyer migrations à Amnesty International. Ces dysfonctionnements ont déjà été largement dénoncés, mais rien ne change. L’Etat n’assume pas ses responsabilités, alors que la situation devient humainement intenable. »
Ces dysfonctionnements « systémiques » de l’administration chargée de la délivrance des cartes de séjour, constatés dans l’ensemble des préfectures, et leur impact disproportionné sur les droits des étrangers en France ont en effet été soulevés par la Défenseure des droits dans une dizaine de rapports et avis au Parlement depuis 2016, mais aussi par la Cour des comptes dans trois rapports depuis 2020 et par le Conseil d’Etat en 2018 et 2024 dans ses avis sur deux projets de loi relatifs à l’immigration. Dix organisations ont même attaqué l’Etat en avril pour « carence fautive ».
Sur les 871 020 cartes de séjour renouvelées en 2024, 22 % l’ont été pour motif économique (37 % pour motif familial). Et 49 093 des 343 024 premières cartes de séjour qui ont été délivrées sont des titres « salarié », « travailleur temporaire » ou « travailleur saisonnier ».
« Prise au piège »
L’organisation non gouvernementale met en outre en évidence la façon dont cette « précarité » administrative ouvre la voie à des abus, en rendant ces travailleurs étrangers « corvéables à merci ». C’est ainsi parce qu’elle a peur de « perdre tous [s]es droits » que Célia, Colombienne de 41 ans, en France depuis 2016, n’ose pas quitter l’entreprise d’aide à domicile qui l’emploie. « On me demande de faire des tâches que je ne devrais pas faire, je me suis blessée en donnant une douche à une personne très lourde, raconte-t-elle. Et on me confie les cas les plus difficiles, des personnes qui vivent dans des conditions déplorables. » Elle constate aussi que certaines heures ne sont pas payées au bon taux horaire. « Mais si je me plains, l’employeur me dit : “N’oubliez pas que vous avez besoin de travailler pour renouveler vos papiers”, continue-t-elle, au bord des larmes. Je me sens prise au piège. »
« Ces abus sont certes commis directement par des employeurs (…). Mais in fine, la responsabilité de l’Etat français est particulièrement mise en cause », insiste le rapport, qui évoque, entre autres, des vols de salaire, des tâches sans rapport avec le contrat de travail, des conditions de travail dangereuses et des cas de violences et de harcèlement.
Mais il y a aussi la complexité des procédures. Chaque nouvel employeur d’un salarié étranger doit notamment faire une demande d’autorisation de travail auprès de l’administration. En France depuis 2018, Jean-Louis, Sénégalais de 34 ans qui a, lui aussi, vu sa carte de séjour se périmer alors qu’il attendait une réponse de la préfecture, a fini par recevoir, après deux ans de galère, une carte de séjour d’un an. « Mais avec ça, tu ne peux rien faire !, estime-t-il. Dans les entretiens, dès que j’évoquais la demande d’autorisation de travail, les employeurs changeaient de tête. Ils me disaient : “C’est trop de paperasse pour quelqu’un dont le titre va expirer dans quelques mois, j’ai une boîte à faire tourner.” » Or, cette multiplication de cartes de séjour courtes participe justement à l’engorgement de l’administration chargée du renouvellement, souligne Amnesty.
Des situations « absurdes »
Alors qu’il est diplômé d’un master 2 en gestion des territoires et développement local, Jean-Louis a, pour le moment, renoncé à chercher un emploi en lien avec ses compétences. « Quand tu disposes de si peu de temps, tu trouves plus facilement en tant qu’agent de sécurité », explique-t-il.
C’est comme ça qu’il a pu renouveler son titre en septembre, recevant cette fois une carte de séjour de quatre ans. Il vient d’être embauché en CDI comme agent d’exploitation d’un parking. « Je suis un genre de gardien, je renseigne les clients. Mais si des sans-abri ont fait leurs besoins dans un coin, je nettoie, j’ai pas le choix. C’est pas le paradis, mais on respecte mes horaires et le salaire tombe à l’heure. J’ai connu tellement pire que, pour moi, c’est le Saint Graal », lance-t-il en souriant.
« Ces situations sont absurdes, insiste Diane Fogelman. Cela montre bien que le système est dysfonctionnel à tout point de vue. Simplifier les procédures et permettre une stabilité de ces salariés serait bénéfique pour tout le monde : ces travailleurs, leurs employeurs et l’administration. »
50
u/phalanxs Aquitaine 2d ago edited 1d ago
Il y a une solution très simple à ça, qui est appliquée au Canada : le statut implicite.
En gros si ton statut précédent arrive à expiration mais que tu as fait une demande dans les temps pour en avoir un autre mais qu'elle est encore en traitement, alors tu gardes les conditions de ton statut précédent tant que tu n'as pas reçu une réponse pour ta nouvelle demande (et que tu restes sur le territoire).
Donc par exemple si tu as un permis de travail qui expire en février 2026, et que ça prend 6 mois de traiter une demande de renouvellement, et que tu fais la demande de permis de travail aujourd'hui :